Les risques les plus dangereux en 2024
par Dave Ingram et Max Rudolph
Gestion du risque, mai 2024
En 2024, le monde semble au bord du gouffre avec des guerres et des élections qui menacent certaines certitudes bien ancrées. Selon les résultats du sondage sur les risques dangereux, les préoccupations du secteur des assurances ont été ramenées à des questions plus traditionnelles après plusieurs années de turbulences. Les risques comme l’inflation, la capacité d’embauche et le maintien en poste des employés, qui constituaient les principales préoccupations énoncées dans les sondages de 2022 et 2023, ont diminué. Pour 2024, les principaux risques sont tous des éléments que nous avons vus à maintes reprises depuis de nombreuses années : la cybersécurité, les profits, la stratégie, les TI et les sinistres.
La participation au sondage a diminué pour atteindre environ 150 participants, après deux ans avec plus de 200 répondants, la septième année depuis 2017 que nous effectuons ce sondage. Cette année, nous avons limité la liste de départ à 48 risques, contre plus de 60 au cours des deux dernières années.
Rang |
2024 |
Rang |
2023 |
1 |
Cybersécurité et cybercriminalité |
1 |
Inflation |
2 |
Prix et rentabilité de la gamme de produits |
2 |
Cybersécurité et cybercriminalité |
3 |
Orientation stratégique et occasions manquées |
3 |
Récession mondiale/nationale |
4 |
Lacunes en matière de TI/systèmes et de technologie |
4 |
Variation des taux d’intérêt |
5 |
Fréquence ou gravité incontrôlées des sinistres |
5 |
Maintien en poste des employés |
6 |
Lois et règlements |
6 |
Lacunes en matière de TI/systèmes et de technologie |
7 |
Catastrophes naturelles |
7 |
Fréquence ou gravité incontrôlées des sinistres |
8 |
Risques émergents |
8 |
Capacité d’embaucher de nouveaux employés |
9 |
Atteinte à la réputation (décote ou mauvaise publicité) |
9 |
Orientation stratégique et occasions manquées |
10 |
Variation des taux d’intérêt |
10 |
Prix et rentabilité de la gamme de produits |
La capacité d’embauche est passée du 8e au 25e rang et le maintien en poste des employés est passé du 5e au 27e rang, ce qui donne à penser que ces deux risques se sont considérablement atténués. Les lacunes en matière de TI/systèmes et de technologie sont passées du 6e au 4e rang, ce qui a inversé le déplacement de l’an dernier, et il s’est classé parmi les cinq premiers pour la sixième fois au cours des sept années d’existence du sondage.
Dix principaux risques
- Cybersécurité et cybercriminalité (en hausse par rapport au 2e rang l’an dernier et une place parmi les cinq principaux risques au cours des sept années du présent sondage) : Les assureurs ont connu une mauvaise année en 2023; plusieurs grandes sociétés d’assurance vie, dont des entreprises actives dans le secteur des régimes de retraite, ont été touchées par des cyberattaques prenant la forme de transfert de fichiers MOVEit, et des sociétés d’assurance maladie ont été victimes d’un nombre important d’attaques par rançongiciel.
- Prix et rentabilité des gammes de produits (en hausse par rapport au 10e rang en 2023 et un classement parmi les dix principaux risques au cours des sept dernières années) : En 2022, les bénéfices ont diminué de 10 % par rapport à 2021 pour l’ensemble du secteur des assurances. Jusqu’au milieu de l’année 2023, les bénéfices globaux ont encore une fois enregistré une baisse. Les sinistres continuent de surprendre, et les hausses de primes n’ont pas suffi à les contrebalancer. Une hausse des taux d’intérêt peut aider à générer des bénéfices si les assureurs peuvent retenir leurs clients dans ce contexte, mais les taux sont susceptibles de diminuer à mesure que s’atténueront les craintes au sujet de l’inflation.
- Orientation stratégique et occasions manquées (en hausse par rapport au 9e rang l’an dernier) : Ce risque faisait partie des cinq principaux risques en 2018 et 2019, avant la COVID. Maintenant que nous avons survécu à la pandémie, ce risque est revenu dans le top 5 parce que la stratégie nous inquiète à nouveau. Les gens s’attendent à ce que de nouvelles stratégies s’imposent, mais personne n’est certain quant à la nature de ces changements, et ils ne sont pas du tout convaincus que quiconque au sein de leur entreprise le sait non plus.
- Lacunes en matière de TI/systèmes et de technologie (en hausse par rapport au 6e rang en 2023) : Ce risque a fait partie des dix principaux risques au cours des sept années d’existence de notre sondage. En 2023, la montée de l’intelligence artificielle dans l’espace public a creusé l’écart constaté par la plupart des assureurs entre leurs propres capacités en TI et celle des meilleurs de leurs concurrents. En plus des contraintes de temps et de coûts liés à la résolution des problèmes existants, il existe un énorme manque de talents et de connaissances de personnes qui comprennent à la fois l’IA et l’assurance.
- Fréquence ou gravité incontrôlée des sinistres (en hausse par rapport au 7e rang l’an dernier) : Les assureurs ont constaté une augmentation de la fréquence et de la gravité des sinistres en 2022 et 2023 dans presque toutes les branches et sur presque tous les marchés. Nous ne pouvons nous contenter d’invoquer quelques méga tempêtes. Et bien que le taux d’inflation ait diminué sur certains marchés, les assureurs ne sont pas certains d’avoir encore vu l’incidence complète de l’inflation qui a déjà amputé leurs provisions actuarielles pour sinistres. Le seul point positif a été la fin des sinistres de surmortalité causés par le COVID.
- Lois et règlements (en hausse par rapport au 14e rang en 2023) : Les organismes de réglementation ont signalé qu’ils élaborent de nouvelles mesures réglementaires radicales pour le secteur des assurances au chapitre de l’IA, des normes de solvabilité, de l’information relative au climat, des soins de longue durée, de la protection des consommateurs et de l’accès équitable à l’assurance. Chaque changement comporte ses propres problèmes de mise en œuvre et son incertitude quant aux conséquences imprévues.
- Catastrophes naturelles (en hausse par rapport au 26e rang l’an dernier) : Dame Nature a trouvé une autre façon de créer des sinistres d’assurance de biens en 2023 avec des pertes de plus de 50 milliards de dollars causées par de violents orages convectifs et la grêle aux États-Unis seulement. Cela fait de 2023 une autre année faste pour les sinistres découlant de catastrophes naturelles sans ouragan majeur, ce qui amène les assureurs IARD à conclure que leur secteur d’activité est encore plus risqué qu’ils ne le croyaient auparavant.
- Risques émergents (en hausse par rapport au 19e rang en 2023) : Il s’agit de l’ultime indice pour lequel les participants au sondage considèrent l’année 2024 comme incertaine. Ils constatent de l’incertitude quant aux niveaux de sinistres potentiels découlant de plusieurs risques continus, de même qu’une forte probabilité qu’une situation imprévue entraîne d’importantes pertes supplémentaires.
- Risque d’atteinte à la réputation (en hausse par rapport au 20e rang l’an dernier) : Les entreprises ont constaté en 2023 que les réputations sont plus fragiles qu’elles ne le croyaient. Elles peuvent être aux prises avec des enjeux d’atteinte à la réputation, les deux côtés du spectre politique ne laissant qu’un chemin étroit quelque part au milieu pour éviter complètement les problèmes. La plus grande histoire d’atteinte à la réputation de l’année a été la publicité qui a causé la chute de la marque de bière la plus populaire aux États-Unis. C’est la première fois que le risque d’atteinte à la réputation se hisse dans le top 10.
- Variation des taux d’intérêt (en baisse par rapport au 4e rang en 2022) : La hausse des taux d’intérêt a entraîné des pertes de valeur marchande dans les portefeuilles de placements des assureurs, mais elle a également réduit la valeur actuelle des paiements différés aux assurés en 2023. Les assureurs vie ont constaté une amélioration constante de la rentabilité tout au long de l’année, ainsi qu’une demande accrue pour des produits qui offrent aux titulaires de police un rendement d’intérêt plus élevé. Les sociétés d’assurances IARD ont vu les actifs adossant leurs provisions actuarielles et leur excédent augmenter pour la première fois en plus d’une décennie. Il n’est pas clair si les répondants s’inquiètent du risque que les taux d’intérêt reviennent à des niveaux proches de zéro ou de la possibilité que les taux augmentent encore davantage, ce qui entraînerait un roulement élevé de la clientèle.
Les plus grandes avancées au classement
Concentration géographique : Saut du 47e au 11e rang. Cette situation est liée aux catastrophes naturelles et aux risques de sinistres incontrôlés qui se trouvaient chacun dans les dix principaux risques.
Terrorisme : Passage du 72e au 45e rang. Les répondants au sondage et leurs entreprises peuvent sembler éloignés des attaques terroristes, mais l’augmentation de la fréquence et de la gravité des attaques en 2023 a contribué à cette progression au classement.
Expositions sur le marché immobilier/prêts hypothécaires commerciaux : Montée du 51e au 28e rang. Les immeubles à bureaux demeurent sous-occupés même en situation de retour au bureau. Le refinancement des prêts hypothécaires commerciaux se fera progressivement et forcera à faire des bilans.
Guerres ou conflits armés majeurs à l’échelle internationale : Du 33e au 13e rang. En raison de nouveaux conflits armés en 2022 et 2023, nombreux sont ceux qui craignent que ces évènements s’étendent à l’échelle régionale ou que de nouveaux conflits éclatent en 2024.
Catastrophes naturelles : En hausse du 26e au 7e rang. Les pertes majeures issues de catastrophes sans ouragan important causées par des tempêtes convectives violentes indiquent qu’il existe de nombreuses façons de perdre.
Le nouveau risque en 2024 – l’intelligence artificielle – fait ses débuts au 24e rang. Il se situe au milieu du peloton. Seuls quelques assureurs ont pleinement mis en œuvre des processus d’assurance assistés par l’IA et les premiers utilisateurs sont probablement plus optimistes.
Les plus importants reculs au classement
Inflation : Passée du 1er au 19e rang. La chute de l’inflation tout au long de 2023 dans de nombreux pays a amené la plupart des répondants au sondage à minimiser ce risque.
Maintien en poste des employés : A chuté du 5e au 27e rang. Les cessations d’emploi ont affiché une baisse de 28 % au cours de la dernière année dans le secteur des services financiers selon le ministère du Travail. Cette amélioration est à la base de ce changement dans le classement des risques.
Âge des employés et des distributeurs : Ce risque est passé du 25e au 47e rang. Un grand nombre de personnes ayant pris leur retraite pendant la pandémie ont réintégré le marché du travail, ce qui a atténué les préoccupations concernant la perte brutale de personnes expérimentées.
Capacité d’embaucher de nouveaux employés : Passé du 8e au 25e rang. Le nombre total de postes vacants a chuté de 28 % au cours de la dernière année dans le secteur des services financiers. Des postes ont été pourvus ou restructurés.
Les faits énoncés et les opinions formulées dans le présent document sont ceux de chaque auteur et ne correspondent pas nécessairement à ceux de la Society of Actuaries, des rédacteurs du bulletin ou des employeurs des auteurs.
Dave Ingram et Max Rudolph sont les coanimateurs de « Crossing Thin Ice », une série de balados gratuits sur la gestion des risques pour les assureurs. Le sondage sur les risques dangereux et le balado « Crossing Thin Ice » sont parrainés par Actuarial Risk Management. https://crossingthinice.podbean.com/